Le déclin des hirondelles de nos villages en Limousin

Le groupe de travail Biodiversité de l’association s’engage activement dans la protection et la promotion de la biodiversité régionale en rendant accessible des sources d’informations factuelles et synthétiques.

Les objectifs du groupe sont multiples : mobiliser le réseau de l’association, aborder la complexité du vivant avec humilité, et surtout proposer un point de vue systémique en permettant aux autres secteurs d’activités abordés par l’association d’y intégrer les enjeux de la biodiversité. 

Dans cette optique, le groupe a commencé un travail d’inventaire et d’analyse d’exemples locaux de la transformation de la biodiversité limousine et de ses effets concrets sur la population et l’économie du territoire.

Ils nous proposent dans ce premier billet de notre nouvelle rubrique “Regards sur la biodiversité limousine” un cas emblématique : le déclin des hirondelles en Limousin.


En Limousin, quatre espèces d’hirondelles sont présentes : l’hirondelle des rochers, l’hirondelle de rivage, l’hirondelle rustique et l’hirondelle de fenêtre. Ces deux dernières sont les plus facilement observables près des habitations humaines.

L’hirondelle de fenêtre (Delichon urbicum) est un petit oiseau migrateur facilement reconnaissable à son ventre blanc et à son dos noir bleuté. Cette espèce emblématique des villes et villages d’Europe est profondément ancrée dans les cultures locales, souvent perçue comme un symbole de renouveau et de fertilité marquant le retour du printemps.

L’hirondelle rustique (Hirundo rustica), quant à elle, se distingue par sa gorge rouge brique, son ventre blanc crème et ses longues rectrices externes formant une queue très échancrée. Plus grande que sa cousine de fenêtre, elle est traditionnellement associée au monde rural et aux bâtiments agricoles où elle niche volontiers. Comme sa congénère, elle fait partie intégrante du patrimoine culturel européen, incarnant dans l’imaginaire collectif la fidélité au terroir et l’annonce des beaux jours.

Malheureusement, les effectifs de ces hirondelles ont dramatiquement chuté. Selon la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) Limousin, l’hirondelle de fenêtre a connu une diminution de 74% de ses populations en 20 ans dans la région. L’hirondelle rustique connaît également un déclin important, et comme l’hirondelle de fenêtre, elle est protégée par la loi. Elles  sont toutes deux inscrites sur la liste rouge des espèces menacées en France d’après les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Leur statut est passé de “préoccupation mineure” en 2008 à “quasi-menacé” en 2016. Pour rappel, ces deux espèces sont intégralement protégées et il est par exemple interdit de détruire leurs nids.

Hirondelle rustique – Sarah Tullot pour Transitions Limousines

Causes du déclin

Les principales causes de ce déclin sont multiples :

  • Raréfaction des insectes : l’hirondelle se nourrit principalement d’insectes dont la quantité a fortement diminué en raison de l’usage intensif de pesticides et de la destruction des habitats naturels, notamment des haies, des prairies et des zones humides.
  • Changement climatique : les conditions météorologiques extrêmes et les variations de température affectent les populations d’insectes et la migration des hirondelles. Par ailleurs, les épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents réduisent la disponibilité de la boue nécessaire à la construction des nids.
  • Raréfaction des boues : en plus du changement climatique, les travaux d’urbanisation, avec l’artificialisation des sols par exemple, sont moins propices pour la fabrication de nids de boue.
  • Perte d’habitats : la modernisation des bâtiments et la rénovation des façades entraînent souvent la destruction des nids d’hirondelles de fenêtre et des formes architecturales peu propices à l’implantation des nids. L’hirondelle rustique privilégie les bâtis accessibles, les fermetures ou transformations des granges et garages amoindrissent ses possibilités de nidification.

Impact sur la population et l’économie locales

Le déclin des hirondelles a un impact sur de nombreux secteurs :

  • Agriculture & Alimentation : les hirondelles jouent un rôle crucial dans le contrôle des populations d’insectes : 150 000 mouches, moustiques et pucerons sont en moyenne chassés pour nourrir une nichée. Leur déclin peut entraîner une augmentation de ces insectes, affectant les cultures et nécessitant une utilisation accrue de pesticides, ce qui peut dégrader la qualité des produits agricoles et avoir des répercussions sur la santé des consommateurs.
  • Santé : la biodiversité a des impacts directs sur la santé humaine. La perte d’espèces comme les hirondelles peut réduire la résilience des écosystèmes face aux maladies zoonotiques. Les hirondelles contribuent à la régulation des populations d’insectes vecteurs de maladies.
  • Forêts : les hirondelles contribuent à l’équilibre des écosystèmes forestiers. Leur déclin peut entraîner une prolifération d’insectes nuisibles, affectant la santé des forêts.
  • Villes et Territoires : la présence d’hirondelles est un indicateur de la qualité de l’environnement urbain. Leur disparition signale des problèmes écologiques plus larges, tels que la pollution de l’air, le manque de végétalisation de l’espace  ou la dégradation des habitats naturels.
  • Éducation et sensibilisation : les hirondelles sont des espèces charismatiques qui peuvent inspirer les jeunes générations à s’engager dans la protection de la biodiversité. Leur disparition peut réduire l’enthousiasme pour les programmes éducatifs et les initiatives de conservation.

Pistes d’actions pour améliorer la situation

Pour endiguer le déclin des hirondelles, de nombreuses actions peuvent être menées localement. Voici quelques exemples :

  • Protection et restauration des habitats : encourager les propriétaires et les municipalités à préserver et restaurer les habitats de nidification des hirondelles. Cela peut inclure la mise en place de nichoirs artificiels, mais avant tout la préservation des sites de nidification naturels. Des bacs de boue ou espaces en terre libre peuvent également être proposés afin de garantir l’accès des oiseaux à la matière première nécessaire à la fabrication ou à la consolidation de leur nid.
  • Réduction des pesticides : promouvoir des pratiques agricoles durables pour réduire l’usage des pesticides et améliorer la disponibilité des insectes.
  • Programmes de sensibilisation : renforcer les programmes éducatifs pour sensibiliser la population à l’importance des hirondelles et les actions qu’ils peuvent entreprendre pour les protéger. Cela peut inclure des ateliers, des conférences et des campagnes de sensibilisation dans les écoles et les communautés locales.
  • Collaboration intersectorielle : encourager la collaboration entre les agriculteurs, les urbanistes, les architectes, les éducateurs, les élus et les chercheurs (naturalistes et écologues) pour développer des solutions intégrées.

Ensemble, nous pouvons agir pour inverser le déclin de l’hirondelle de fenêtre et de l’hirondelle rustique en Limousin et préserver la richesse de notre biodiversité.

Un article écrit par Nicolas G., complété par Pierre, amendé par Lucile, relu et corrigé par Sarah et Chloë.


Si ce type de billet vous inspire et/ou vous donne envie d’agir, rejoignez l’association et le groupe de travail “Biodiversité” ! Et si vous voulez en savoir plus sur les hirondelles ou les oiseaux en général, contactez la LPO Limousin : https://www.limousin-lpo.fr/.

Références :

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